J’ aime beaucoup cette expression qui comporte deux mots totalement contradictoires et qui sortait comme un slogan des lèvres d’un fameux anarchiste non violent des années 70, qui écumait le quartier latin et qui était venu me rendre visite (MOUNA pour ceux qui s’en rappellent!).
Cette expression est bien plus qu’une boutade facile et comporte une grande sagesse.
Elle est d’autant plus d’actualité que nous sommes à une époque où des gens de tous bords érigent sur internet leur verbiage en vérité absolue et entraînent les chercheurs dans des voies obscures.
Dans ces conditions ne pas douter c’est se montrer bien naïf et s’exposer à se fourvoyer dans des impasses.
Le mental bien souvent décrié dans les voies spirituelles doit être pris pour ce qu’il est et être mis à sa juste place mais en aucun cas ne doit être annihilé. C’est un outil merveilleux qui peut nous apporter de nombreuses lumières tout au long de notre cheminement.
Et l’aspect positif du doute c’est la remise en question de nos certitudes bien souvent plus encombrantes que roboratives.
Il y a donc un temps normal dans notre recherche où nous questionnons des tas de concepts, qui bien entendu sont le produit du mental ( ne jamais l’oublier):mais notre mental a besoin d’être nourri sinon il délire et l’angoisse monte.
Dans ces domaines comme dans tant d’autres, tout est affaire de discrimination et de mesure.
Ceci étant dit, quelques soient les réponses données, elles ne sont toujours qu’un doigt qui pointe vers la lune et pas la lune elle même !
Lorsque je consultais Bernard sur ce sujet du doute, il eût une fois de plus une réponse lumineuse qui me conforta dans mon appréhension de ce problème.Je livre sa réponse intégralement car elle est éclairante :
« Douter est quelque chose de sain et de naturel….Un chercheur( car je ne témoigne que pour les chercheurs) qui ne douterait pas, ne serait tout simplement pas un chercheur.
Notre recherche se résume en une succession d’expériences, de croyances(surtout au début!)d’idées et bien sûr de doutes…Et ceci plus ou moins selon chaque personne et c’est normal.
D’où vient le doute ?
Et bien tout simplement de ce que nous entendons ou lisons, qui concerne l’expérience d’un autre ou de plusieurs autres personnes et DONC DE CE FAIT IL NE S’AGIT PAS DE NOTRE PROPRE EXPÉRIENCE : c’est l’unique problème et il est de taille !
Il est donc tout à fait naturel d’avoir des doutes au sujet de quelque chose que nous ne vivons pas nous-mêmes.
UN ÊTRE RÉALISÉ VOIT LES CHOSES TELLES QU’ELLES SONT SANS AUCUNE INTERPRÉTATION : MAIS PAS LE CHERCHEUR ! »
Voilà le doute remis à sa juste place et surtout déculpabilisé.
Si j’observe ma propre expérience durant les nombreuses années de ma recherche spirituelle : il m’a été nécessaire malgré la force et la passion de mon engagement de « tenir le doute en laisse » certes mais de ne pas l’éradiquer tout à fait, pour ne pas être emporté dans des chemins qui ne me correspondaient pas.
Le danger, même dans des voies sérieuses et honnêtes, c’est d’être influencé par la pensée dominante et de la prendre pour parole d’évangile, alors qu’elle ne correspond pas nécessairement à notre expérience.
De plus dès que l’on trouve à redire, le système a tendance à se protéger en disant que c’est l’ego du chercheur qui se met en avant.
Et là cet argument culpabilise énormément le chercheur et le déstabilise, il a alors souvent tendance à abdiquer pour ne pas être stigmatisé encore plus.
Il y a à mon sens une énorme différence entre un ego qui peut certes enfler et un discernement, voire un doute, tous deux libérateurs et respectueux de notre évolution personnelle.
Mais ceci étant dit, il arrive toujours un moment de la recherche où le mental ne suffit plus pour le chercheur sérieux.Non seulement il ne suffit plus mais devient dangereux car il empêche d’atteindre les couches les plus subtiles de la recherche, celles où fuse l’AMOUR.
C’est le stade de l’abandon et de la confiance et bien entendu il est évident que ce stade ne peut se vivre que sur un fond véritable d’Amour et là encore je m’efface devant les paroles de Bernard qui n’en parle si bien que parce qu’il le vit :
« Dans cet AMOUR véritable, il ne s’agit pas d’aimer quelqu’un, ni même quelque chose, MAIS BIEN PLUTÔT DE TOMBER EN ETAT D’AMOUR et alors là les mots s’arrêtent, et le vécu devient tellement intense que j’en brûle encore rien que d’en parler…Il y aurait tant de choses à dire sur ce beau sujet d’AIMER…….ce serait beaucoup trop long mais je peux dire pour résumer :
UN VRAI CHERCHEUR AVANCE SUR CE CHEMIN, PLUS PAR AMOUR QUE PAR INTELLECT. »
Et Bernard rajoute ce point à mon avis fondamental car ma justification et mon encouragement au doute ne sauraient se faire sans cette vision complémentaire apportée par un Être Réalisé:
« OUI IL FAUT TOUT DE MÊME QU’UN JOUR APRES DES ANNÉES DE DOUTES LÉGITIMES, DE TRAÎNAGES DE PIED ET D’INDÉCISION : IL FAUT QUE LE CHERCHEUR QUI BIEN ENTENDU VEUT ALLER AU BUT ULTIME:RESSENTE PLEINEMENT QUE CELUI QUI TÉMOIGNE NE LE FAIT QUE POUR LUI SEUL ET RIEN D’AUTRE ET QUI PLUS EST POUR RIEN, OUI ABSOLUMENT POUR RIEN :ALORS TOUT DEVIENT POSSIBLE ET C’EST LE CHERCHEUR QUI DOIT ADAPTER LES PAROLES DE L’ÊTRE RÉALISÉ A SON ETAT D’ÂME DU JOUR ET NON LE CONTRAIRE
L’individu est totalement incapable, impuissant, par ses propres moyens, de réaliser quoi que ce soit, ce n’est que cet Amour total, inconditionnel, tellement merveilleux, qui fait tout, transforme tout et qui réalise peu à peu cette magnifique alchimie : la vie particulière en LA VIE tout court… »
Voilà tout est dit et clairement : le doute est donc normal et nécessaire mais devient délétère s’il persiste et ne débouche pas sur l’AMOUR INCONDITIONNEL.
Nous voyons malheureusement beaucoup de nos contemporains ayant tellement été trompés, douter constamment de tout et ainsi se cantonner dans une position désabusée et sceptique. Cela se comprend très bien vu le contexte mais on ne peut s’empêcher d’y voir une souffrance extraordinaire ayant pour base ce manque d’Amour et de confiance.
Bernard probablement à cause de cela entre autres, est particulièrement sévère vis à vis des gens qui trahissent l’AMOUR et le malmènent.
C’est une telle valeur dans ce monde en dérive qu’il ne peut être qu’encouragé, exalté et c’est là que reprend tout son sens la magnifique phrase d’Élisabeth de la Trinité si appréciée par Bernard :
IL FAUT TOUT FAIRE PAR AMOUR : AU SEUIL DE LA VIE SEUL L’AMOUR DEMEURE !