JULIUS EVOLA.
Ce texte de jeunesse de 1928 du philosophe Julius Evola (1898-1974) est sans concession par rapport aux attachements infantiles que nous développons pour donner un sens aux choses et trouver éternellement une consolation dans des chimères que nous fabriquons nous-mêmes.
Ce texte m’a bouleversé parce qu’au-delà de sa difficulté et de l’effort pour bien le comprendre, il est entré en résonance avec ce que j’ai toujours ressenti aux côtés de Bernard et de la fulgurance de sa Réalisation. Ce niveau d’Être ne laisse aucune place en effet aux « débilités émotionnelles » si courantes dans les milieux spirituels et nous laisse face à CE QUI EST, sans aucune concession, sans un Dieu (qu’il soit bon ou courroucé d’ailleurs), sans un sens déterminé à la souffrance humaine. Notre désir de donner un sens, une explication à chaque chose ou événement, n’est là que pour nous rassurer de l’angoisse fondamentale et ne fait que retarder notre désidentification. Julius Evola trace là avec vigueur le portrait de celui qu’il appelle le guerrier, noble, courageux et déterminé et que Bernard nomme : « Le Chercheur » ! Solitaire, il fait face à CE QUI EST se dépouillant sans cesse de toutes ses illusions : « faisant toute chose, sans jamais s’identifier à rien de ce qu’il produit. »
Cher lecteur, je t’encourage à passer la difficulté de ce texte pour laisser vibrer en toi le sentiment de noble solitude auquel il mène.
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Pour que l’action soit libérée, il faut avoir laissé derrière soi la « Providence ». Terne larve du monde religieux, cette notion a la vie dure : sous d’autres formes, on la retrouve ancrée au centre même des mythes de beaucoup de ceux qui, le cœur vide et le regard absent, croient avoir aujourd’hui libéré du Dieu le monde. Elle oppresse l’âme humaine, en entretient l’impureté, en confirme l’état de syncope où celle-ci ne connaît ni respiration, ni communication, ni éveil.
Le dépassement de la providence correspond essentiellement au retour à un état d’ « immanence absolue » : à ce qu’est, au plus haut degré, le stade magique, le stade primordial de la conscience individuée : lorsque la réalité ne parvenait pas par le biais de pensées nées de perceptions sensorielles, mais lorsque l’expérience consistait en la sensation directe de « pouvoirs », de « présences » impersonnelles se définissant par la simple capacité de provoquer certains effets. Un monde par conséquent saturé d’action et qui s’épuisait dans l’action : qu’il s’agisse d’une action mesurée ou d’une action déchaînée, sans solution de continuité de qualité différente, sans une « métaphysique » qui ne coïncide exactement avec une « physique » et vice-versa, sans « esprits » qui ne soient rien d’autre que les actes des choses et des êtres.
De nombreux auteurs ont déjà relevé non seulement l’analogie entre ce stade magique et les conceptions de la science moderne, mais encore la nette opposition de l’une et de l’autre avec la conscience religieuse, survenue comme une phase intermédiaire d’obscurcissement. En fait l’une et l’autre vision admettent comme base la simple loi causale : il n’existe ni agents personnels et « spirituels », ni intentions téléologiques, ni plan directeur rationnel derrière les choses -il n’existe que des possibilités isolées qui peuvent manifester des modalités précises de mouvement, d’action et même de conscience. Dans l’ordre de ces manifestations règne un rapport déterministe bien précis : « Si tu fais ceci, en ce cas, voilà ce qui se passe », en fonction d’un rapport invariable et certain que ne peuvent modifier aucune persuasion, supplique, intimidation ou prière- mais éventuellement, et uniquement, l’intervention précise d’autres causes. En ce sens, tout n’est qu’action, action « à l’état libre », finalement- et les lois de nécessité concernant uniquement les conséquences, elles ne font que procéder naturellement des causes, une fois posé que celles-ci existent. C’est ainsi que la magie, tout comme la science, se passe de la providence- au sens large de croyance en des êtres supérieurs qui gouverneraient le monde selon un plan raisonnable, et susceptible, du moins partiellement, de variations par le biais soit de la « grâce », soit de sanctions de type moral, soit de la « compassion » : selon des rapports, en définitive, qui ne seraient pas tout simplement ceux du pur agir. La magie, c’est exact, a souvent eu affaire à des « esprits », agents personnels semblables à ceux qu’admettent les religions. Mais comme le relève Frazer : « En ce cas, on ne modifie pas la forme qui leur est propre et on adopte exactement la même attitude que vis-à-vis des objets inanimés ; on les contraint, on les force, au lieu de se les concilier et de se les rendre propices comme le ferait une religion*.
Note: Il ne faut pas pour autant perdre de vue que la magie connaît, elle aussi, des prières, des disciplines, des obligations éthiques. Dans la magie, tout cela n’est pas prescrit dans un but moral- pour se rendre propice l’esprit des dieux- mais uniquement dans un but causal, c’est-à-dire en vue de l’action nécessitante qu’elles peuvent exercer sur les forces invisibles lorsqu’elles sont conduites avec rigueur.
De sorte que la magie admet que tous les êtres personnels, aussi bien humains que divins, seraient en dernière analyse soumis à ces forces impersonnelles qui contrôlent toutes choses mais pourraient toutefois être fléchies par quelqu’un sachant les manipuler lors de cérémonies magiques appropriées. » Dans l’Egypte ancienne par exemple, les mages s’attribuaient le pouvoir de contraindre les dieux, même les plus grands, à exécuter leurs ordres ; ils les menaçaient même de destruction en cas de désobéissance. En Inde on enseignait- d’après l’indication selon laquelle « le monde est fait d’action(karma), se maintient par l’action et se dissout par l’action. » – que la grande trinité divine elle-même( personnifiant précisément les trois pouvoirs de création, conservation et dissolution)était soumise aux mages et aux yogis
Une formule très connue exprime d’ailleurs ceci : « Tout l’univers est soumis aux dieux, les dieux sont soumis aux noms de puissance (mantras) ; quant aux brahmanes ce sont nos dieux. »
Dans cet ordre de choses par conséquent, les rapports aussi demeurent de pure action, de pure causalité. Le mage, au lieu de s’ouvrir en tremblant à la majesté divine, comme c’est le cas de la conscience religieuse, ne supplie aucun « Dieu », ne recherche la faveur d’aucun être, terrible ou miséricordieux, comme le « sentiment » ou la « moralité » pourraient le lui suggérer. Pour lui, tout cela n’est qu’enfantillage et reviendrait à supplier le feu de ne pas brûler, à espérer le convaincre au contraire de mouiller, en lui faisant valoir la noblesse de ses sentiments et les besoins de son âme ! Ce que recherche le mage au contraire, ce sont des rites capables de provoquer des effets précis et certains, qui ne procèdent que de rien d’autre que de la force nécessitante et positive du rite lui-même-sous réserve, bien entendu, qu’il ne rencontre pas des forces supérieures à la sienne, ou bien dont la sienne ignore tout, et qui l’arrêtent. La formule nietzschéenne qui réduit « Dieu » à la notion de « la plus haute des puissances » -c’est-à-dire celle qui, jusque-là, n’en a pas rencontré de supérieure à elle- cette formule, le mage pourrait donc l’adopter. C’est d’ailleurs précisément le concept exprimé par Eliphas Lévi lorsqu’il écrit : « le mot de responsabilité n’a de sens que pour celui qui a échoué… A l’origine, nous trouvons deux esprits qui un jour se trouvèrent face à face. Chacun voulait la divinité pour lui seul : l’un réussit, il fut Dieu, l’autre échoua, il fut le démon. »
Ceci nous ramène donc à cette notion de réalisme actif qui dissipe les brouillards exhalés par les fièvres du cœur. Tel est le principe d’un nouvel ordre de pureté, de dignité, de libération intérieure. L’homme en est exclu tant qu’il ne ressent pas l’irréalité absolue de tout ce que représente le monde « moral » et « spirituel », tant qu’il n’a pas fait table rase de tout cela, jusqu’à ce qu’il ait pris contact avec la force des choses et, l’ayant réalisée comme un état de sa propre conscience, ne voit plus qu’elle et ne reconnaît plus qu’elle.
Cette force est une et multiple. A partir de ce à quoi diverses traditions donnèrent le nom de « Vent cosmique », « Esprit vivant », « Souffle », Prâna Mana, s’articulent des centres distincts, des « quantités » distinctes de causalité et de puissance. De tels centres sont à l’état libre : principes et fins à eux-mêmes, ils développent des séries distinctes d’actions sans qu’aucune loi ne les détermine, hormis celle de leur propre liberté. Aucun « dieu » au- dessus d’eux ; le chemin est libre, en haut comme en bas. La seule limite est celle, interne, de leur capacité de réaliser ou non leurs possibilités.
A cet égard, nous n’avons fait qu’esquisser combien la notion de « providence » est loin de s’épuiser dans le décor truculent du Dieu céleste, gouverneur anthropomorphe des événements cosmiques, justicier des méchants et compensateur des bons et des dévots. Car il suffit en définitive de remplacer par exemple la loi des simples causes, d’une façon ou d’une autre, par une loi de « fins » pour que, mutatis mutandis, on retombe dans une conception providentielle –plus dangereuse même que la précédente. Ceci doit être bien clair : avec les « fins » et les « raisons », ce qui existe au départ, ce ne sont plus les puissances particulières à l’état libre avec pour loi celle de leur propre action- mais, antérieurs à elles et les dominant, les dirigeant, constituant leur être et leur volonté, ce sont désormais des principes, des mobiles et des normes que l’on pose. Et la validité de ces derniers est différente de celle de la loi de fait imposée, dans un « champ » et à une période donnée, par l’un ou plusieurs desdits pouvoirs agissant par sympathie : ce qui, évidemment, est l’exacte transcription-même si manquent les « personnes » et leur passivité devant les instances morales- de la notion de « plan providentiel ».
Dans tout rationalisme il faut par conséquent discerner une survivance de la mentalité religioso-providentielle. Et le rationalisme, il faut l’entendre non seulement en tant que conception psychologique d’une doctrine prétendant tout épuiser du cerveau humain, mais encore dans l’acception plus vaste, logique et même, dans une certaine mesure métaphysique, d’une conception qui remplace l’ordre des causes, quel qu’il soit, en un ordre de principes-qui connaît donc ce qu’on appelle la vérité et la nécessité des raisons autrement qu’en tant que transcription d’une vérité et d’une nécessité simplement de fait. Pour nous faire comprendre plus clairement : dès l’instant où l’on affirme qu’une chose donnée est impossible parce qu’absurde, on est déjà rationaliste. En revanche on ne l’est pas, lorsqu’on réduit l’« absurdité »(logique) à une simple impossibilité (empirique), lorsqu’on réduit le fait de ne pas pouvoir concevoir au simple fait de ne pas pouvoir. Tout simplement parce que, compte tenu de cette causalité donnée, en ce lieu et à ce moment donnés, la présence d’autres causes, m’empêche, moi, de réaliser ces différents états de fait que, à partir de l’évidence émanant de l’expérience correspondante maintenant, je ne peux pas reconnaître comme tel- à cause d’une limitation en tous points comparable à un bras ligoté ou une jambe paralysée. La « vérité » quelle qu’elle soit, doit être ramenée à la pure constatation d’un état de fait- lequel s’explique en fonction d’un rapport donné de pouvoirs, état qui peut, d’ailleurs, en droit et compte tenu de la libre « possibilité » inhérente à ces pouvoirs, être remis en question.
C’est sur cette base que se définit ce qu’est vraiment l’action, ce qu’est vraiment l’individualité. Lorsque la foi disparaît, ou bien on s’écroule (« C’est dès le commencement des temps que les hommes ont inventé Dieu afin de pouvoir vivre sans se suicider. », comme dit le Kiriloff de Dostoïevski), ou bien, pour la première fois on s’éveille à l’être, à l’être absolu de l’individu. On pourrait ajouter que le véritable sens de la divinité surgit à ce moment précis- dans le regard pur qui ne fuit pas et qui ignore le bien et le mal- dans la sensation que tout est à la fois proche et lointain, que les êtres sont libres et qu’ils peuvent, au sein de cette liberté, aller où bon leur semble sans qu’intervienne aucune loi, hormis celle des effets précédant des causes qu’ils ont eux-mêmes mises en œuvre.
C’est ainsi que se démasquent les résidus providentialistes cachés également derrière les divers « historicismes », évolutionnismes et optimismes. La peur de concevoir la liberté a pour conséquence de supposer des rapports de fins, d’intention, de signification là où il n’y a en réalité que des faits, libres, originaux, non déductibles- ou, à la limite, des cycles de développement clos, hétérogènes, que l’on ne peut enchaîner ni subordonner à une loi supérieure préexistante qui les expliquerait Quand on parte d’ « évolution » ou bien d’ « involution », de lois cycliques ou bien au contraire de lois en spirale, quand ce n’est pas de « transferts dialectiques » à la Hegel- on commet la même erreur, on cède à la même superstition : on abandonne le point de vue de la réalité et de la liberté. L’individu agissant céda la place à l’individu agi. La manie des modernes de tout faire entrer de force dans les schémas de l’évolution, du progrès et du « dépassement » de façon obsessionnelle est d’autant plus étonnante qu’ils ne soupçonnent pas un instant de quelle chimère ils sont les jouets. L’histoire est faite de l’apparition de pouvoirs se manifestant selon des possibilités données, et qui s’opposent ou se combinent, se heurtent ou se fondent, se repoussent ou bien s’attirent. Aucune cause ne se « dépasse » : certaines cessent de se manifester et s’éloignent, d’autres leur succèdent dynamiquement- et c’est tout. Aucune, sous prétexte qu’elle se perd dans la nuit des temps, n’a plus ou moins de valeur que la réalité d’aujourd’hui ou de demain : la seule loi est celle d’une simple et singulière diversité qui n’admet nul commun dénominateur, qui ne donne pas plus ou moins de sens aux valeurs en fonction de leur éloignement dans le temps, de même qu’elle ne valorise pas diversement les choses en fonction de leur éloignement dans l’espace. L’histoire nous montre la réalisation de quelques possibilités- possibilités qui sont par ailleurs virtuellement, de la même façon que partout furent et sont toujours également ouvertes les voies d’en haut et celles d’en bas. De même que les choses, les êtres, les événements et les grands courants historiques se sont formés librement, sans qu’il y ait jamais eu quelqu’un pour leur dire ce qu’ils « devaient » être : exactement comme les nuages se forment et se dissipent au gré du vent et du soleil, « océaniquement » – de sorte qu’ils n’iront jamais que là où leur propre action les conduira (« L’Eon c’est l’enfant qui joue. Le Règne lui appartient » et « Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas » Héraclite.). Le temps lui-même, dans son irréversibilité, est fils de la convoitise, de la soif ivre et négative : et telle est aussi la nature de toute conception qui donnerait à cette irréversibilité un sens et une valeur et l’appellerait ensuite « histoire » ou « évolution ». L’« histoire »n’a pas, et n’a jamais eu comme loi celle d’un bien, d’une perfection vers laquelle tout tendrait finalement : la « perfection », « Dieu », ne sont rien qu’une possibilité, une parmi beaucoup d’autres qui furent et qui peuvent être choisies par les êtres selon une voie montante et descendante, ,en fonction de leur volonté et de leur action (« Immortels mortels, mortels immortels vivant la mort de ceux-ci, mourant de la vie de ceux-là » Héraclite, fragment 62)
Loin des brouillards, au-dessus des brouillards, voici qu’à nouveau resplendissent les cimes inviolées, stellaires- et l’esprit se purifie, le lien se relâche. Quand on regarde d’un autre œil chaque chose, chaque être et chaque action, le sens de la vanité des sentiments s’impose. Il n’y a ni bien, ni mal ; il n’y a ni motif de haine ni motif d’amour. Chaque être est ce qu’il est, il a sa propre voie, il est une cause qui développe les possibilités de ce à quoi il s’est identifié, selon la même loi d’évidence que les phénomènes naturels. Son action peut me causer du bien ou me causer du mal- mais ce n’est pas une raison pour que je me croie tenu de l’aimer ou de le haïr : ce serait aussi puéril que de haïr le feu parce qu’il me brûle ou de vénérer l’eau parce qu’elle me désaltère. De pair avec l’aspect « providentiel », c’est l’aspect « humain » du monde qui s’évanouit : la passion, l’attachement, la colère font alors place au regard clair qui comprend, à l’action appropriée qui s’inscrit avec lucidité dans un cadre dont l’unique critère est celui-ci : ni « bien » ni « mal », ni « vrai » ni « faux » : simplement ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Les mouvements profonds de l’âme ne disparaissent pas mais s’éveillent à l’état pur : n’ayant rien d’autre qui les précède sinon l’inertie d’une force totalement maîtrisée et totalement équilibrée, ils s’en échappent selon une absolue spontanéité, sous la forme non pas d’une émotion, mais d’une action – pratiquement comme les éclairs de circuits qui se créent dans l’éther et relient, l’espace d’un instant, des pôles éloignés, des qualités irréductibles.
Aucune crainte sémitique, aucune jalousie luciférienne, aucun érotisme chrétien, aucun orgueil titanesque devant le Dieu. C’est le propre d’un véritable guerrier que de reconnaître comme supérieure, franchement et sans rancœur, la force supérieure- qui n’est rien d’autre que l’expression la plus achevée de sa propre race-le front haut, sans se sentir humilié pour autant, sans que son âme soit infectée de jalousie ou de désir. Et c’est aussi le propre des vrais conducteurs d’hommes que de vouloir avoir autour d’eux des êtres qui ont une haute idée de leur dignité- alors que c’est celui des femmelettes en transes que de s’abandonner dans des prières, des frayeurs et des dévotions, l’âme en déroute sous le poids du besoin qui l’accable. Dans un monde ainsi purifié, décontaminé, on perçoit que toutes les voies sont libres, que toutes les possibilités sont offertes, on réalise que chaque instant est un absolu commencement- que tout est comme il doit être, que rien n’est en « haut » ou « en bas » si ce n’est des repères, que tout est semblable et différent, que tout est vide et que tout est plein- le monde est libre, il est formé de destins qui se façonnent d’eux-mêmes puisqu’en chaque état, plan et mode d’existence se reflète sur le cosmos la loi de celui qui, comme l’indiquent les Mystères : … » crée en disant : « Je deviens ce que je veux et je suis ce que je suis » et qui, moteur immobile, demeure identique à lui-même, faisant toute chose sans jamais s’identifier à rien de ce qu’il produit. » (Hyppolite)
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Pour les courageux qui sont allés jusqu’au bout, je rajoute ces quelques mots éclairants de Julius Evola qui caractérisent bien notre époque et l’attitude qu’elle requiert du chercheur véritable:
« Si l’on considère le moment historique que vivent actuellement les sociétés occidentales, on se trouve en face de la réalisation la plus achevée de ce que peuvent être l’anti-tradition et l’anti-hiérarchie. Jamais comme aujourd’hui la vie n’a ainsi perdu tout contact avec ce qui est méta-physique, jamais comme aujourd’hui elle n’a autant tourné à vide, remplaçant ce qui pouvait la soutenir et la guider par ces illusions en tous genres que sont : « les orgueils de la culture moderne ». D’où la crise que connaît le monde contemporain où jamais comme aujourd’hui les circuits n’ont eu autant tendance à se fermer- l’épilogue ne pouvant être que la catastrophe, à moins que, grâce à un saut qualitatif net, le contact ne soit rétabli
Il y a donc une sensation de table rase, d’écroulement de tous les appuis, de tous les succédanés et de toutes les justifications que le monde de l’humain peut offrir. A ce moment-là, ou bien on s’écroule ; ou bien on s’évade ; ou bien on tente de s’ouvrir une voie nouvelle. Nous affirmons la possibilité d’une telle voie. Celui qui ne relâchant sous aucun prétexte la tension qui lui a permis jusque là de rompre tous les ponts, continue de s’adonner avec sérieux et sévérité à sa recherche, parvient non pas à « croire », non pas à « penser », non pas à « espérer » mais à savoir quelque chose de la réalité métaphysique, réalité dont il finit par participer. Il se trouve alors consacré, en fonction de sa dignité, par une force au-delà de la force, par une conscience au-delà de la conscience, par une vie au-delà de la vie. »
A bon entendeur salut !