Comme le dit si justement le cantique des oiseaux, nous sommes si souvent:« Prisonniers d’une cage construite sur nos doutes » et nos attachements sont tels que même si parfois la porte de la cage est ouverte, nous ne le voyons même pas.Une fois de plus ce texte va nous emmener aux frontières du possible et nous montrer le prix à payer pour sortir de la cage.
Si nous devons mourir, mourons en ce chemin !
N’est ce pas mieux qu’ici, dans cette boue fétide ?
Il vaut mieux par amour être dans l’infamie
Que d’avoir en ce monde les fonctions les plus viles.
Tant de gens ici bas se livrent à la ruse
Dans l’espoir d’obtenir le monde, cette charogne.
Mettons que la passion soit pire que cette ruse
Qu’importe, prends-la telle, elle fera moins de mal.
Si dans cette passion tu te jettes à la mer
Si tu troques la ruse contre ce grand désir
On dira:ton désir est un signe d’orgueil
Comment atteindrais-tu ce lieu où nul n’arrive ?
Et il te faudra dire : « Je préfère mourir
Dans l’orgueil insensé de cet ardent désir
Plutôt que d’attacher mon cœur à une échoppe »
Nous avons entendu et vu dedans ce monde
Tant de choses et pourtant pas même un seul instant
Nous n’avons réussi à nous changer nous-mêmes.
Tous nos attachements font la route si longue
Que faire de ces mendiants sans foi et sans prière ?
Tant que je ne meurs à moi-même et aux autres
L’âme ne sera pas libérée de ses rets.
Quiconque n’est pas mort aux autres comme aux choses
Est un mort car il n’a pas accès au dedans
Seule l’âme éveillée peut en trouver l’accès
Et qui vit par les autres n’est pas homme de la Voie.
Dans le deuil de mes nuits TU brilles par TA Présence
Fais moi anéantir les ténèbres du moi
Crois tu que ce chemin soit une voie facile ?
LE MOINDRE PAS ICI EST DE DONNER SA VIE.
Que te dirais- je encore quand rien ne peut se dire ?
Quand il ne reste plus une rose à cueillir ?
Quand la stupeur soudain, m’a tout entier saisi
Quand aucun plein jamais ne remplira le vide .
Devant toi la Sagesse devient un nourrisson
et la raison mature est perdue dans Ta quête
Comment pourrais-je atteindre à cette essence pure
moi, infime fœtus, un fétu de l’étant ?
Toi qu’on ne peut connaître et Toi qu’on ne peut voir
Toi que ne peuvent atteindre ni le gain ni la perte.
Au delà de tout doute, l’infini est sans borne
comment est-il alors l’Un qui demeure l’Un ?
Retire donc ce voile, cesse de me brûler
de consumer mon âme dans les voiles, en secret.
L’océan des stupeurs soudain m’a englouti
Sauve de la tempête mon âme tourmentée
prise dans le tourbillon des vagues océanes
et restée hors du voile qui couvre les secrets.
Me voilà tout entier englué dans l’ego
prends moi donc par la main!Sinon malheur à moi !
Mais tant que je dirai les regrets de mon cœur
Hors de l’Un, je serai toujours perdu, en quête.
Guide moi , Toi qui sais que je suis en errance
donne moi le bonheur, même si, je le sais
me voilà importun car j’ai trop tardé.
Quiconque en Ta demeure a trouvé le bonheur
en Toi se perd entier et de soi désespère.
Ne t’imagine pas que ce chemin est court
car ici tant de mers succèdent aux déserts !
IL FAUT UN CŒUR DE LION POUR PARCOURIR LA VOIE
car le chemin est long et la mer si profonde.
Notre lot sur la Voie n’est que stupéfaction
tantôt rires, tantôt pleurs quand nous marchons vers Elle.
Trouver un signe d’Elle est bien la seule chose
comme vivre sans Elle n’est que vide et que honte.
A quoi nous sert la vie sans la source de vie ?
Toi, si tu es un homme, ne vis pas sans ta vie.
Il faut un homme, un vrai, pour suivre cette Voie.
Il faut donner sa vie au seuil de ce Palais.
Il faut être un héros, renoncer à la vie
pour le titre de gloire d’être un homme du Chemin
Si la vie ne vaut rien sans la Vie de la vie
sacrifie ta chère vie, conduis toi en homme libre
car Elle, ta Source vive, te remplira de Vie.
Et quiconque parmi vous est homme de la Voie
Qu’il prenne le chemin, qu’il vienne et qu’il avance !
Mais bien que cette Voie soit leur salut certain
Chacun pour l’éviter se trouve une excuse.
Ô prisonnier des formes
Cesse d’aimer d’amour sa gracieuse beauté !
Sais tu que cet amour t’a plongé dans les ronces ?
Cet amour qui te tient, sais- tu qu’il te retient ?
La rose est certes belle, mais toute sa beauté
éphémère qu’elle est, ne durera qu’un jour.
Pour les âmes parfaites, ces amours ne sont rien
qu’une pauvre illusion, source de lassitude.
Car bien que son sourire te fasse chavirer
la rose nuit et jour te fera bien pleurer.
A la rose renonce, puisqu’à chaque printemps
Elle rit, non pour toi, mais de toi, malheureux.
Nota bene: je rappelle que cette merveilleuse traduction du cantique des oiseaux de farid Attar, est de Leili Anvar parue aux éditions Diane de Selliers.
Je demande toute l’indulgence des lecteurs pour les libertés que j’ai prises par rapport au raccourcissement du texte et à son réarrangement « très personnel » mais le recueil du cantique comportant près de 5000 vers j’ai estimé pouvoir me permettre cette « hérésie » si d’un autre côté elle pouvait susciter des envies de lecture de ce texte.
J’ai ainsi je l’espère en quelques articles pu faire passer la quintessence du cantique.