101questions essentielles à Bernard : Partie 15 : « Autour des Êtres réalisés »

 

Bernard Harmand 2025.

Dans les temps qui viennent j’ai décidé, vu la demande et l’assiduité de certains lecteurs de publier un ensemble de ce que j’appellerai « 101 questions essentielles à Bernard. » Ces 101 questions qui sont extraites soit d’entretiens oraux, soit de réponses à des mails ou lettres, couvrent à mon avis l’essentiel de ce dont a besoin un chercheur sérieux pour découvrir sa Nature Véritable.
Une petite mise au point est indispensable afin de préciser à chaque lecteur, à chaque chercheur, la nécessité de s’imprégner du sens profond des réponses qui vont suivre sans trop s’attarder sur la forme particulière donnée à chaque réponse.
En effet, la forme concerne spécifiquement la personne qui a posé la question et qui a obtenu la réponse qu’elle « pouvait entendre ». Ce qu’elle peut entendre est fonction de sa personnalité propre, de ce qu’elle est capable d’accepter, de son évolution à l’instant même où la question a été posée et d’autres facteurs plus subtils.
Le fond de la réponse va directement au Cœur et concerne tout chercheur sérieux et passionné. L’impact produit est alors fonction de la ferveur de chacun.
Il est indispensable que la réponse soit « absorbée » sans que l’intellect ait le temps d’interpréter ce qu’il a entendu. Plus tard la personne y réfléchira, retournera les paroles dans tous les sens et fera agir son sens critique.
La compréhension intellectuelle est utile pour prendre conscience de l’existence des concepts, mais elle est incapable de les dépasser tout simplement parce qu’elle en fait partie.
Il ne faut donc pas donner trop d’importance à la compréhension, et se souvenir avec passion que seule l’Expérience personnelle nous conduira au but tant désiré.
De nombreuses personnes pourront se dire : que de répétitions ! C’est vrai et tous les sages un peu sérieux ont répété des milliers de fois, sous des formes différentes les mêmes recommandations. Le mental humain a tellement tendance à se figer, à se scléroser, à se durcir, qu’il faut marteler sans cesse les mêmes évidences ,pour que par chance une ou l’autre arrive à pénétrer et transpercer la couche de notre ignorance (qui est rappelons le un des trois poisons du bouddhisme). En préparant ce travail, j’ai moi-même relu ce que j’avais lu tant de fois et à chaque lecture, un petit plus apparaît dans la compréhension et l’intégration de ces vérités de base.
Abordons donc ces pépites, gracieusement offertes, avec Amour et humilité, qu’elles nous accompagnent dans notre voyage merveilleux , à la découverte de notre Nature Véritable.

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Le sujet concernant les questions et réponses qui suivent est très délicat car il concerne un des points les plus opaques pour beaucoup de chercheurs et d’êtres humains. Qu’est ce qu’un Être réalisé ? Cela existe-t-il vraiment ? N’est ce pas encore une illusion entretenue par nos folles espérances, de vouloir accéder à un état idéal, alors que chaque jour avançant nous fait prendre conscience un peu plus de la vanité de ces espérances. Tous les scandales actuels autour des « gurus » ne font qu’amplifier le doute légitime que l’on peut avoir sur cet état. Comment ne pas sombrer dans le désabusement, le nihilisme, le relativisme? Celui qui écrit ses lignes ne peut que répondre humblement, qu’il a fait cette Rencontre et que c’est pour lui une évidence intérieure.
Pourquoi fait-on cette Rencontre ? JE N’EN SAIS RIEN !
Ce que je sais simplement c’est qu’elle a bouleversé ma vie en un instant et que les années passées depuis( 17 ans à ce jour) n’ont en rien entamé cette certitude intérieure que non seulement l’Être réalisé existe mais qu’en plus son Amour , si on y est réceptif, ne fait que fendiller un peu plus chaque jour, le mur de nos concepts, de nos illusions et nous rapproche de notre Vraie Nature.
Dans les réponses qui suivent Bernard approche au plus près de ce que les mots peuvent permettre de la réalité de cette chose, qui , comme il le dit n’est même pas un état.
Laissons résonner et infuser en nous ces paroles sans argumenter trop vite et laisser partir au quart de tour, notre  ratiocination habituelle.

73) Comment un être ayant réalisé sa Véritable Nature, ne faisant qu’un avec l’Absolu, étant en dehors du temps et de l’espace, peut-il s’intéresser au monde manifesté et à ce qui s’y passe ? Comment peut-il même encore percevoir le monde manifesté ?

Comprenons bien ceci : une personne ne peut pas être libéré, mais au contraire, l’Être Réalisé est libéré de la personne. La différence est essentielle et il fait absolument s’imprégner de cette vérité.
Cette question concerne l’individu, l’ensemble corps-mental, c’est-à-dire la forme que « les autres » perçoivent. En réalité, cela ne se passe pas comme on le croit. Il serait sage de répondre à ce genre de question en disant : « réalisez d’abord et vous verrez ensuite ! »
On ne peut pas tout dire, tout expliquer lorsqu’il s’agit d’un état qui n’en est pas un puisqu’il se situe dans la non-dualité et que nous parlons à partir de la dualité, ce qui est inévitable. Le problème est toujours le même : les gens voient un homme « réalisé », ils pensent qu’il est « réalisé », mais ils continuent à voir un homme, un corps ; Si l’on ne voit qu’un homme, on ne trouvera pas un grand changement dans sa vie habituelle. Selon les Êtres, ils continueront à apparaître physiquement comme avant, mais ceci ne concerne que les apparences. En réalité, il en est tout autrement. L’Être libre est libéré une fois pour toute de son individualité, il est libéré de la personne de façon définitive et disons qu’il regarde le film de la vie de cet individu qu’il a cru être comme si c’était un rêve, sans plus ; lorsque vous sortez de l’état de rêve, vous pouvez songer aux rêves que vous avez vécus durant cet état, mais vous n’y songerez pas très longtemps, sachant très bien que ce n’était qu’un rêve. L’Être qui a réalisé sa véritable Nature, de la même façon, sortant de cet état que l’on appelle « veille », constate que ce n’était en fait qu’un autre rêve et « assiste » à la suite du film sans en être perturbé. L’écran n’est pas affecté par les images qui s’y reflètent.
L’Être réalisé ne dit pas qu’il perçoit le monde manifesté, parce que pour lui, il n’existe rien en dehors du Soi. Le Soi est la totalité du manifesté et du non-manifesté et pour l’Être libéré, il n’y a aucune différence, mais un tout unique. Mais les mots n’exprimeront jamais ce qui n’est pas exprimable.

74)  Pourquoi tous les Gurus affirment-ils que le monde n’est pas réel, que le corps n’est pas réel, qu’il n’y a pas « d’autres », et qu’en fait tout ce qui est perçu n’a aucune réalité ?

Bernard : L’Être réalisé voit l’existence dans un tout que l’on nomme unité. On ne peut pas réellement comprendre cet état parce que le mental qui est l’outil de notre compréhension n’a jamais et n’aura jamais l’expérience du Soi. De ce fait il ne peut être question de compréhension lorsque l’on parle du Soi. Et cela, nous devons absolument le comprendre avant d’aller plus loin.
Ramana expliquait très bien ce qu’est la réalité en disant : « Ce qui n’est pas permanent ne vaut pas la peine que l’on se donne tant de mal »- « ce qui apparaît er disparaît n’est pas réel . » La réalité est donc ce qui ne change pas, ce qui est stable, permanent, éternel. Partant de cette certitude, si on élimine tout ce qui est impermanent, il ne restera plus que la vie consciente, le simple fait d’être qui est toujours présent, dans les trois états, veille, rêve et sommeil profond. Le fait d’être sans identification particulière, est le Soi et il n’y a rien d’autre de permanent.
On peut donc en déduire une méthode très efficace et qui, de plus, est la seule directe : si l’on observe attentivement notre existence en tant que cet ensemble corps- mental ainsi que le monde dans lequel nous vivons et qu’ensuite, consciencieusement et avec détermination,  nous éliminons un par un tout ce qui n’est pas permanent, la recherche sera terminée. Ce n’est pas plus difficile que cela. Alors pourquoi ne pas le faire ici et maintenant ? Là aussi, la réponse est simple : parce que nous sommes toujours attachés à ces fameuses tendances mentales que nous croyons indispensables alors qu’en fait nous en sommes simplement esclaves.
La vie individuelle, c’est-à-dire l’ensemble corps-mental que chacun est bien persuadé d’être, n’est qu’une succession d’impressions dans le mental. Toute expérience est sensorielle et dépend entièrement de l’expérimentateur. Ces impressions mentales ne sont jamais permanentes puisqu’elles cessent au cours du sommeil profond. C’est celui qui expérimente qui est toujours présent et donc permanent et c’est Cela que nous devons découvrir. Si l’individualité avec ses cinq sens, si Dieu, si le monde et l’ensemble de ce qui est perçu à l’état de veille sont réels, ils devraient être également perçus durant le sommeil profond.
Ce qui est réel n’apparaît ni ne disparaît : la réalité Est en permanence et Cela, Je le suis.

75) Maharaj dit souvent à ceux qui viennent l’écouter qu’un certain type de réceptivité est nécessaire à la compréhension véritable de ses paroles, il parle souvent « d’aperception ». Quels sont les moyens qui permettent d’atteindre ce type de réceptivité ? Comment la réception des paroles d’un maître peut-elle se faire si celles-ci doivent être a-perçues (non perçues)

Bernard : il ne faut surtout pas se compliquer la vie au cours d’une recherche spirituelle. Les mots n’expriment pas toujours et même rarement ce qu’il convient d’entendre. Disons tout simplement que seule l’expérience,  la pratique régulière, quotidienne, de l’introspection nous amènera à une compréhension intuitive et tout intérieure de ce que l’on lit ou entend de cette Vérité que nous cherchons. L’intellect a son rôle à jouer, mais avec la pratique, la compréhension intellectuelle, le raisonnement feront place à un état différent dans lequel les choses « arrivent ». L’intellect qui par nature « veut » comprendre, « veut » toujours, progressivement n’a plus besoin de vouloir parce que la compréhension se fait toute seule de même que les nuages s’éloignent dans le ciel et disparaissent lentement, faisant place à un ciel d’azur, sans que l’on ait eu à faire quoi que ce soit.

76) Pourquoi donc ces grands Maîtres comme Ramana, Ramakrishna, Nisargadatta et d’autres meurent-ils de cancer ? Est-ce à cause du karma d’autres dévots qu’ils prennent sur eux ? des Êtres aussi admirables ne devraient pas mourir de la sorte. Et ne me dites pas que le corps n’est rien ! Qu’a-t-on à gagner et à souffrir aussi tragiquement ? la guérison miraculeuse existe bel et bien. Pourquoi ne pas donner comme exemple l’harmonie du corps ?

Bernard : Ce n’est pas que le corps n’est rien, tant que l’on est convaincu d’être ce corps, il est même très important, et il est vrai que de toute façon, il vaut mieux le garder en bonne santé.
Mais, et Ramana l’a dit à de nombreuses reprises aux dévots qui, comme vous, refusaient de le voir souffrir, que pour lui il n’avait pas d’importance car il se savait être bien au-delà. Il a même répété souvent qu’il ne fallait pas prendre ce corps pour Ramana. Que peut-on dire de plus ? En quoi l’harmonie du corps serait-elle un exemple pour la recherche du Soi ? Car j’espère que la motivation de votre courrier est bien la recherche de votre véritable Nature. Quelle guérison faut-il souhaiter ? Celle d’un corps qui, de toutes façons, finira par mourir, ou la guérison de cette terrible maladie qui est l’identification au corps ?
Le vrai miracle serait de réaliser pleinement cela. Vous dites : « Des Êtres aussi admirables ne devraient pas mourir de la sorte ». Qui prétend que Ramana est mort ? pensez-vous que Ramana ait été perturbé un seul instant par le départ naturel de son corps ? Alors que le corps meurt d’un cancer ou d’un arrêt cardiaque ou autre motif, quelle importance ? Ramana certes n’a pas donné comme exemple l’harmonie du corps, mais n’est pas normal puisque son magnifique message est justement : Vous n’êtes pas ce corps !

77) À quoi reconnaît-on un Être réalisé ?

Bernard : Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir ! cela veut dire qu’un chercheur sérieux, c’est-à-dire ultra- passionné, avide de vérité, animé du désir brûlant de parvenir au But ultime-et lui seul- sera capable de reconnaître ce qu’en fait il recherche ardemment.
Il serait temps de comprendre que ce que l’on appelle « Réalisation » ou « libération » concerne le Soi et non la personne. L’être réalise qu’il n’est pas cette personne qu’il a cru être si longtemps. L’être est libéré de l’illusion de n’être qu’une personne physique. Comment cette « prise de conscience » pourrait-elle modifier en quoi que ce soit l’aspect physique habituel de l’Être réalisé ?  Il n’y a pas de label de qualité affiché sur un Être réalisé et il se passe souvent le contraire, mais là encore, il faut savoir regarder avec les « yeux » de l’âme, au-delà des apparences. Dans la plupart des cas, l’aspect physique d’un Libéré se dégrade et il offre à ceux qui ne voient pas au-delà des formes, rien qui puisse attirer les regards. Par-delà les fameuses apparences, l’Être réalisé est l’unique Soi et donc la totalité de ce qui existe et il n’y a rien d’autre.

78)  La Réalisation du Soi signifie-t-elle la disparition de l’ego, ou simplement la conscience de ne pas être l’ego ?

Bernard : Il existe une multitude d’exemples pour faire comprendre ce qu’est réellement cette fameuse réalisation. Parmi eux il y a celui que tous les adeptes de l’Advaïta Vedanta(la non-dualité) connaissent : cette reine qui pendant des jours cherche son collier de perles et qui est désespérée de l’avoir perdu car il représente une immense fortune. Elle cherche partout, elle veut absolument le retrouver, oubliant même de manger et de dormir. Puis, un jour, un serviteur, ne comprenant pas son inquiétude et lui ayant demandé ce qu’elle recherche, lui fait remarquer que ce collier est autour de son cou. La reine se rend alors compte de son erreur et exulte de joie, d’avoir enfin retrouvé ce collier. Voilà ce qu’est la recherche spirituelle : retrouver ce qui a toujours été là, n’est-ce pas incroyable ? la reine a toujours eu ce collier autour de son cou et pourtant, elle était persuadée de l’avoir perdu et en était très malheureuse. Il en est ainsi du chercheur spirituel : un beau jour il sera fou de bonheur d’avoir retrouvé ce qu’il a toujours été.

79) L’Être Réalisé qui est totalement libéré de l’individualité, qui connaît d’expérience sa nature réelle, n’est plus identifié à son corps de même qu’au monde qui l’entoure. Participe-t-il encore aux événements de chaque jour ? Quelle vision a-t-il du monde et des hommes ? Est-il totalement insensible aux malheurs du monde ? Se réjouit-il des événements heureux qui arrivent autour de lui et dans le monde en général ?

Bernard : Réaliser sa Vraie nature, c’est prendre conscience que l’on n’est pas une forme déterminée. À partir de là, l’identification avec cette personne physique que l’on a cru être pendant si longtemps, cesse et ne peut plus revenir. Toutes les questions qui sont posées ne concernent pas l’Être réalisé, mais l’individu, la personne, que les autres continuent de percevoir et malgré tout d’identifier à l’Être réalisé. Pourquoi ne pas essayer d’imaginer que celui qui est libéré n’est plus un corps, mais que ce corps fonctionne encore, malgré tout ? mais pour résumer un peu et répondre tout de même à ces questions, disons que l’Être réalisé a une vision unifiée de l’ensemble de la manifestation, sans échelle de valeurs. Pour l’Être réalisé, seul le Soi est réel, tout le reste est vu comme une surimpression passagère, comme un rêve est une surimpression dans le sommeil. L’Être réalisé n’est pas concerné par la mort physique pas plus d’ailleurs que par la naissance, puisque naissance et mort ne concernent que le corps. Le corps a besoin de la Vie pour exister, mais la Vie n’a pas besoin de corps pour être : ainsi en est-il du Soi.
Comment pourrait-il être impatient de quitter son corps puisque cet abandon a déjà été réalisé une fois pour toutes ? Amours, bonheurs, malheurs, événements heureux : tant que le corps fonctionne tout cela est perçu bien sûr, mais c’est le mode de fonctionnement qui est différent. Celui qui est encore identifié à l’ensemble corps-mental qu’il pense être, est persuadé qu’il agit, qu’il peut changer les choses, qu’il a une action quelconque sur les événements, etc… L’Être réalisé sait que l’individu est totalement vécu et que cette personne n’est qu’une des multiples formes qu’emprunte la vie pour se manifester. La différence est énorme et seule la réalisation nous le fera comprendre.

80) Quel est le rapport d’un Être réalisé à la souffrance physique ? peut-elle avoir une quelconque emprise physique sur lui et si oui, le fait de savoir que l’on n’est pas ce corps permet-il de moins appréhender la douleur ?

Bernard : Comme l’expression l’indique clairement, la souffrance est justement physique. On peut même aller encore plus loin en disant que la douleur concerne le corps et que la souffrance est mentale et résulte de la peur de la douleur et de ses conséquences. Le problème est toujours le même, on parle d’un Être réalisé mais on persiste à l’identifier à un corps physique ! Bien sûr qu’un corps ressent la douleur, mais ce n’est pas le corps qui est réalisé : on a réalisé que l’on n’était pas ce corps, c’est différent ! par contre celui qui sait qu’il n’est pas ce corps physique ne peut plus appréhender quoi que ce soit et donc, entre autres choses, la douleur. Mais ce genre de question n’est pas utile au chercheur spirituel, que peut-elle lui apporter ? Il est préférable d’essayer de comprendre le mieux possible ce qu’est réellement cette réalisation : Qui réalise quoi ?

81) Vous rendez-vous compte de l’évolution spirituelle de chacun ?

Bernard : Dans le monde de la dualité, il existe des différences et même des individus qui paraît-il ne se ressemblent pas.
Pour celui qui n’est plus identifié à aucun concept et qui Est le Soi, la diversité créée par la dualité n’apparaît plus. Le monde de même que les individus sont moi-même et ne peuvent « être perçus » que comme étant le Soi. Mais peut-on comprendre cela ?

82) Vous avez affirmé, après avoir répondu à mes questions, avoir découvert les réponses en même temps que vous les lisiez ! J’aimerais savoir « Qui » a découvert ces réponses ! En effet il ne peut s’agir de votre ego, ni de votre « corps-mental » puisque vous êtes complètement « désidentifié ».Il est clair pour moi que ces réponses ont été directement dictées par le Soi avec lequel vous ne faites qu’Un. La question reste donc entière : comment avez-vous pu « découvrir » les réponses à mes questions ?

Bernard : Ce genre de question n’a aucun intérêt en ce sens qu’elle n’apportera rien qui puisse servir au progrès spirituel. Si, comme il est dit dans la question, il est clair que ces réponses ont été directement dictées par le Soi, où est le problème ? mais plus sérieusement, pourquoi essayer de comprendre ce qu’est l’état d’un Être réalisé quand on ne comprend pas encore son état présent ? C’est tout simplement impossible ! Oui l’homme libre, le libéré, l’Être réalisé, ou toute autre appellation, est désidentifié, mais pas seulement de la personne, de l’individu, mais de l’ensemble de la manifestation. Alors effectivement, on peut dire, mais seulement quand on y est, que les choses arrivent puisque l’on en est « témoin ».
Mais le chercheur peut-il comprendre que tout cela n’est réel que pour celui qui observe dans la manifestation ? Pour l’Être réalisé, la vérité est simplement qu’il ne se passe absolument rien !

83) Il est souvent dit que pour que le chercheur atteigne son But, la présence d’un Guru est indispensable. Celui-ci lui accorde alors une initiation ainsi qu’une Upadesha(direction). En quoi consiste cette initiation ? Quelle est alors la direction à suivre ?

Bernard : On dit souvent n’importe quoi et la spiritualité n’échappe malheureusement pas à la règle. Le But c’est le Soi, c’est-à-dire notre Vraie nature et cette vérité c’est simplement le fait d’Être. L’Être existe en permanence et il est de ce fait toujours présent. Le Guru ne peut donc rien donner de nouveau. Comme tout est déjà là mais que le chercheur ne le voit pas, ne le comprend pas encore, le rôle du Guru va dans l’autre sens. Il montre au chercheur ce qu’il n’est pas et il aide celui-ci à se débarrasser de tout ce qui encombre la claire perception de ce qu’il Est réellement. C’est tout ! mais c’est beaucoup pour celui qui veut vraiment entendre.  Pour résumer cette question, nous redirons ce qui a été dit dans une précédente réponse : si notre désir d’atteindre le But est grand, si notre passion ne laisse aucune place à d’autres passions secondaires, ne nous inquiétons jamais des directions que nous prendrons, parce que, de toutes façons, elles seront inévitables et nous conduiront au But ultime.

84) On parle souvent de la grâce du Guru, de l’aide indispensable qu’il donne et des bienfaits du darshan.

Bernard : Le Guru ne donne rien au disciple, du moins, rien de visible, rien de perceptible au moyen des sens physiques. Mais ce qui est certain, c’est que le fait de « reconnaître » son maître, de sentir intuitivement  qu’il a réalisé ce que nous recherchons encore, c’est cela la grâce. Si nous passons notre temps à attendre, du haut de nos conceptions de ce que nous semble être la Réalisation, qu’un signe indiscutable s’offre à nos yeux, alors attendons ! Oui cette grâce est le résultat d’une vie de lutte, de prières, de méditations, de doutes, d’interrogations, de malaises, d’états d’âme très pénibles.
Et c’est au moment où tout semble impossible, lorsqu’après avoir tout tenté, tout mis en œuvre, au prix parfois très élevé de sa santé, oui, c’est à ce moment-là seulement que tombe le mur. Ce mur est le mur des pensées et des concepts qui, las d’être attaqué, maltraité, secoué dans tous les sens, rend les armes, il cède enfin. Et l’ombre fait place à la lumière. L’ombre c’est l’ego et la lumière c’est le Soi.

85)  Pourquoi la réceptivité à la grâce du Guru varie-t-elle selon les périodes ? Est-ce que le fait d’être moins réceptif à cette grâce peut être dû à une hyperactivité du mental ? Que faut-il faire pour augmenter cette réceptivité ?

Bernard : Pourquoi ne fait-il pas toujours beau ? le soleil brille en permanence et pourtant nous ne le voyons pas toujours parce qu’il y a souvent des nuages ou tout simplement la nuit. De même, ce que l’on appelle la grâce du Guru n’est pas quelque chose qui arrive ou qui repart, cela est présent en permanence.
Tout ce qui est expérimenté est sensoriel et dans ce domaine, rien n’est stable, cela change tout le temps. Cette réceptivité n’est en fait que notre attention à Ce qui Est. Cela Est en permanence, mais parfois nous l’oublions, tout simplement. Le simple fait de s’en souvenir avec intensité nous ramène au Soi et bien sûr, nous avons l’impression que Cela est revenu. C’est vrai au point de vue des sensations que nous en avons, mais c’est faux pour ce qui concerne le Soi qui lui est stable. Il ne va ni ne vient : il Est.