101 questions essentielles à Bernard : Partie 14 : Autour du sommeil et du rêve.

 

 

Dans les temps qui viennent j’ai décidé, vu la demande et l’assiduité de certains lecteurs de publier un ensemble de ce que j’appellerai « 101 questions essentielles à Bernard. » Ces 101 questions qui sont extraites soit d’entretiens oraux, soit de réponses à des mails ou lettres, couvrent à mon avis l’essentiel de ce dont a besoin un chercheur sérieux pour découvrir sa Nature Véritable.
Une petite mise au point est indispensable afin de préciser à chaque lecteur, à chaque chercheur, la nécessité de s’imprégner du sens profond des réponses qui vont suivre sans trop s’attarder sur la forme particulière donnée à chaque réponse.
En effet, la forme concerne spécifiquement la personne qui a posé la question et qui a obtenu la réponse qu’elle « pouvait entendre ». Ce qu’elle peut entendre est fonction de sa personnalité propre, de ce qu’elle est capable d’accepter, de son évolution à l’instant même où la question a été posée et d’autres facteurs plus subtils.
Le fond de la réponse va directement au Cœur et concerne tout chercheur sérieux et passionné. L’impact produit est alors fonction de la ferveur de chacun.
Il est indispensable que la réponse soit « absorbée » sans que l’intellect ait le temps d’interpréter ce qu’il a entendu. Plus tard la personne y réfléchira, retournera les paroles dans tous les sens et fera agir son sens critique.
La compréhension intellectuelle est utile pour prendre conscience de l’existence des concepts, mais elle est incapable de les dépasser tout simplement parce qu’elle en fait partie.
Il ne faut donc pas donner trop d’importance à la compréhension, et se souvenir avec passion que seule l’Expérience personnelle nous conduira au but tant désiré.
De nombreuses personnes pourront se dire : que de répétitions ! C’est vrai et tous les sages un peu sérieux ont répété des milliers de fois, sous des formes différentes les mêmes recommandations. Le mental humain a tellement tendance à se figer, à se scléroser, à se durcir, qu’il faut marteler sans cesse les mêmes évidences ,pour que par chance une ou l’autre arrive à pénétrer et transpercer la couche de notre ignorance (qui est rappelons le un des trois poisons du bouddhisme). En préparant ce travail, j’ai moi-même relu ce que j’avais lu tant de fois et à chaque lecture, un petit plus apparaît dans la compréhension et l’intégration de ces vérités de base.
Abordons donc ces pépites, gracieusement offertes, avec Amour et humilité, qu’elles nous accompagnent dans notre voyage merveilleux , à la découverte de notre Nature Véritable.

__________________________________

Les réponses qui suivent sont essentielles et doivent être lues et relues avec attention, car elles touchent un domaine souvent mal compris par les chercheurs. D’une manière très claire Bernard resitue les choses et revient constamment à ce qu’il nomme souvent LA BASE, que d’autres appellent LE SOI et qui se situe bien au delà « des états » qui eux apparaissent et disparaissent. Cette BASE doit illuminer continuellement notre recherche dans les moments difficiles de la vie où nous sommes trop identifiés à notre petite personne, d’une manière ou d’une autre.
Le simple fait de savoir qu’elle est là constamment, que nous en ayons concscience ou pas est déjà un merveilleux catalyseur sur la Voie.

66) Lorsque nous dormons, durant la phase de sommeil profond, a-t-on conscience d’être ?
Si oui, pourquoi n’en garde-t-on pas un souvenir (ou une trace quelconque) ?
Si non, l’Absolu est-il alors un état dans lequel on ne peut avoir conscience d’être ?

Bernard : Il faudrait poser la question à celui qui dort ! Est-ce que dans le sommeil profond une telle question apparaît ? La réponse est non ! Qui ne dit ne pas être conscient pendant le sommeil profond ? On ne peut pas dire que l’on n’était pas conscient pendant le sommeil profond. Ce qui est vrai, c’est que nous ne nous en souvenons pas.
Mais un trou dans la mémoire n’est pas un trou dans la conscience.
En fait, dans cette question, c’est l’individu, donc l’Ego qui demande s’il a conscience d’être présent pendant le sommeil profond. Cette fois, et vu sous cet angle, la réponse est bien sûr : non ! L’Ego n’est pas présent durant le sommeil profond, car lorsqu’il est présent pendant le sommeil, il s’agit alors du rêve.
Parlant de l’état de rêve on pourrait se demander : a-t-on conscience d’être durant le rêve ? Oui, le rêveur a conscience d’être, mais seulement d’être, à aucun moment il ne s’aperçoit qu’il rêve. Tout ce qui est perçu en rêve, lui semble bien réel. C’est lorsqu’il sort de cet état de rêve que l’individu peut se dire : « mais ce n’était donc qu’un rêve ! ». De la même manière, lorsque l’individu sortira de l’état dit « de veille », c’est-à-dire lorsqu’il réalisera sa Vraie Nature, tout en soupirant et en riant, il dira : « Ce n’était donc qu’un rôle dans un film ! ». mais répondons clairement à cette question avec une mise en garde toutefois : il n’est pas nécessaire d’essayer de comprendre ce qu’il y a lorsque l’Ego est absent ou ce qu’il n’y a pas . Tout raisonnement à ce sujet, ne mènerait à rien.
La conscience d’être, c’est-à-dire l’Êtreté, est permanente ; ce sont les états qui sont impermanents, et qui changent, pas le Soi. Le Soi est l’écran sur lequel les images(les états) apparaissent et puis disparaissent. Le Soi n’est jamais affecté, bien qu’étant à la base de la manifestation.
Encore une fois, ce que l’on appelle l’Absolu, ou le Soi ou Dieu s’il le faut, n’est pas un état parce qu’un état n’existe que par rapport à un autre… L’Absolu est au-delà des états, mais il les sous-tend. Lorsque l’Absolu n’est pas manifesté , il est le Soi, c’est-à-dire l’Êtreté. La différence entre le Soi non manifesté et le Soi manifesté, c’est que le premier existe de lui-même, par lui-même et qu’il est le Tout, alors que le Soi manifesté, qui prend le nom d’Ego, se heurte à l’espace-temps et a donc besoin d’une forme qui, pour un homme, par exemple, est un corps. Le Soi EST mais l’Ego apparaît par intermittence. C’est pour cette raison que l’on peut dire que l’Ego n’existe pas réellement, en ce sens qu’il n’a pas d’existence propre, indépendante. Il n’est qu’un pâle reflet du Soi. Dans l’Hindouisme on dit souvent que l’Ego est un imposteur parce qu’il se fait passer pour le Soi. L’exemple est excellent, et Ramana d’ajouter : « Découvrez l’imposteur et soyez libre ! »

67) Dans quel mesure est-il possible de comparer l’état de sommeil profond avec la Conscience pure quand on sait que le premier est passager alors que l’autre est atemporelle ?

Bernard : la réponse se trouve en partie dans la question… C’est vrai, l’on compare très souvent l’état de sommeil profond avec « l’état initial », parce que nous comprenons mieux avec des exemples et celui-ci est bon. En effet si nous arrivons à comprendre que durant le sommeil profond, et bien qu’il n’y ait conscience ni du corps, ni du monde, ni de Dieu, nous existons malgré tout, un grand pas sera effectué dans la bonne direction.
La comparaison ne se situe qu’à ce niveau cependant. Il est très simple de comprendre que si nous continuons à exister sans avoir de conscience du corps, c’est que nous ne sommes pas uniquement le corps. C’est ce que nous expérimentons chaque nuit, au cours du sommeil profond, mais nous n’en gardons pas le souvenir.
Mais la comparaison est également trompeuse parce que le sommeil profond n’est qu’un état, alors que le Soi se trouve au-delà des états, et c’est pourquoi l’on se presse d’ajouter que la Réalisation ressemble au sommeil profond avec la Conscience en plus. Ce qui en fait ne veut pas dire grand-chose, mais c’est ce qui rapproche le plus de la réalité qui ne peut être exprimée.
Le sommeil profond n’existe que parce qu’existent la veille et le rêve, c’est à dire les trois états. Ce qu’il faut absolument comprendre, c’est que ce ne sont pas les états qui importent, mais celui qui constate les états, le témoin qui se trouve, Lui, au-delà de tout état. Il n’existe qu’un Soi, mais il existe plusieurs états. Si donc nous supprimons les états, que restera-t-il ? Le Soi ! pendant l’état de veille, je suis, durant l’état de rêve, je suis, au cours du sommeil profond, je suis encore : c’est le fait « Je suis » qui ne change pas et ce sont les états qui changent sans cesse tout simplement parce qu’ils n’ont aucune existence propre. Les états sont irréels en tant que simples états, mais ils sont réels en tant que ce qui se présente à nous sous l’apparence de ces états.
Tout le monde est habitué à dire : « j’ai bien dormi , j’étais heureux durant mon sommeil. »mais tout le monde reconnaît également ne pas savoir ce qui se passe durant le sommeil profond. Nous pouvons tirer deux éléments importants de ces constatations : d’une part une impression de bonheur et d’autre part l’inconscience, l’ignorance de cet état quand il se produit. Mais pour pouvoir dire à l’état de veille : « j’étais heureux durant le sommeil, c’était la paix parfaite. », il a bien fallu que cette expérience se produise et qu’il y ait quelqu’un pour l’apprécier ! Donc la conscience existe réellement durant le sommeil profond, mais elle n’est pas activée parce qu’il n’y a pas les formes perceptibles dans l’état de rêve ou l’état de veille. La félicité éprouvée durant le sommeil profond provient de l’absence de perception, les sens étant, disons, engourdis.
Il faut à nouveau préciser que la comparaison de « l’état de réalisation » avec le sommeil profond, concerne la félicité éprouvée pendant cet état, mais uniquement son côté négatif parce que cette félicité est le résultat der l’absence de pensées et qu’elle n’est que transitoire. Ce n’est donc qu’un petit aperçu, un flash de la félicité suprême qui Elle, est permanente.

68) L’ego est-il présent lors de la phase de sommeil profond ? Si oui, est-ce lui qui nous permet de dire au réveil : « j’ai dormi » ? Si non, comment se fait-il qu’il réapparaisse dans les phases de rêve et d’éveil alors qu’il avait disparu dans la phase de sommeil profond ?

Bernard : Non l’ego n’est pas présent lors du sommeil profond. Pourquoi l’ego réapparaît-il, que ce soit dans l’état de veille ou l’état de rêve ? parce que c’est sa nature d’apparaître et de disparaître. Seul le Soi n’apparaît ni ne disparaît : il Est tout simplement.
Au cours du sommeil profond, l’ego est absent, réabsorbé dans le Soi. On dit couramment qu’il est en sommeil. Mais peu importent les termes, ce qui est certain c’est qu’il n’est pas actif et c’est pour cette raison qu’il ne peut se souvenir de l’état de sommeil profond puisqu’il ne l’expérimente jamais. La mémoire est un processus du mental et le mental n’étant pas présent, il ne peut donc pas y avoir souvenir.
Par contre, pour affirmer au réveil : « j’ai bien dormi ! », il fallait bien qu’une certaine conscience, informelle certes, ait été présente et cette « conscience informelle » est le Soi. Là où rien n’est expérimenté, parce que le processus d’expérimentation-l ’ego-est inactif, là se trouve le Soi et Je suis Cela en permanence, au-delà du temps, au-delà des formes et au-delà de tout concept.

69) Le rêve correspond-il à un état où le mental vagabonde de pensée en pensée comme dans l’état de veille ? Dans ce cas le rêve est-il néfaste pour le chercheur en quête du Soi ? La Réalisation est-elle accompagnée d’une disparition de l’état de rêve ?

Bernard : C’est toujours la même confusion. Être libéré c’est ne plus être identifié à l’ensemble corps-mental, ni à aucune forme particulière : c’est être en totalité libéré de la personne. Donc la Réalisation n’est accompagnée de rien ! L’état de rêve, comme les différents états, concerne l’individu et les sens qui perçoivent ces états. L’individu continue à fonctionner comme auparavant, il joue le rôle qui lui a été attribué à sa naissance par le metteur en scène et donc il mange, boit, dort, rêve éventuellement et, selon les apparences, semble se comporter comme avant.
Le rêve n’est pas plus néfaste pour le chercheur que ne l’est l’état dit « de veille ». L’important est justement de bien se rendre compte que l’un comme l’autre ne sont que des états.

70)  Dans « Ellam Onru » (Tout est Un) il est dit que si l’on suppose que les trois états (veille, rêve et sommeil profond) forment ensemble un long rêve, notre Véritable Nature représente le réveil mettant fin à ce rêve. Comment le rêveur qui s’identifie totalement à son « long rêve », peut-il se rendre compte qu’il est en fait celui qui dort ? En d’autres termes, comment le rêveur étant au sein de son rêve, peut-il s’en extirper pour pouvoir enfin se réveiller ?

Bernard : En se posant justement ce genre de question !
Ce que l’on appelle la « recherche spirituelle » est un processus mental et relève uniquement de l’intellect. Tout ce que l’on dit sur les trois états, veille, rêve et sommeil profond, représente un très bon exemple pour faire comprendre que pour expérimenter ces différents états, il faut bien que quelqu’un ou quelque chose soit présent en permanence. Seul quelque chose de permanent peut constater l’impermanence d’autre chose. Ce qui est permanent est le Témoin et c’est le Soi. Ce qui est impermanent est mental et s’exprime par des expériences sensorielles qui, comme leur nom l’indique, ne peuvent exister que par l’intermédiaire des sens. Alors une question se pose : sommes-nous nos sens ? Ou sommes-nous Celui qui constate qu’une telle question puisse se poser ? Si nous étions nos sens, où serions-nous pendant le sommeil profond, là où il n’y a justement pas de « sens-ations » ?
Comprenons également, pour la dernière partie de la question, que nous n’expérimentons jamais le fait de nous endormir pas plus que le fait de se réveiller, cela se produit lorsque la dualité « spectateur-spectacle » disparaît ou apparaît. Il n’y a alors plus d’expérience, puisque pour qu’une expérience soit possible, il faut obligatoirement être deux : celui qui expérimente et la chose expérimentée. Cela n’est donc possible que dans la dualité.
L’instant précis du réveil n’est en réalité pas perceptible si l’on observe attentivement cet instant. Ce que nous prenons pour le réveil, arrive quelque temps après et il s’agit plus exactement du processus perpétuel de l’identification au corps, puis à tout ce qui nous entoure : Je dans un corps, dans le monde…

71) Existe-t-il plusieurs niveaux de conscience ? Si oui, le rêve et le monde manifesté sont-ils issus du même niveau de conscience ?

Bernard : Oui, on peut dire qu’il existe plusieurs niveaux d’inconscience. Considérant que seul le Soi est la véritable conscience, il faut admettre qu’il y a des personnes plus ou moins inconscientes de leur Nature réelle.
Les états de veille et de rêve font tous les deux partie du monde manifesté. La différence entre la veille et le rêve se situe uniquement dans la durée. Peut-on voir le monde sans corps ? peut-on voir le rêve sans corps ?
Non, la seule différence là encore c’est le corps. Dans le rêve, il s’agit du corps astral et dans la veille,  du corps physique. Ce n’est pas ce qui est vu qui est important, mais celui qui voit. Donc, les états de veille et de rêve ne concernent que l’Ego ou individualité.

72) Lors du passage de l’état de veille à l’état de sommeil, juste à la limite entre ces deux états, surviennent parfois des accès de joie dont on a pleinement conscience. Quelle est la nature de ces accès ? Comment se fait-il qu’ils apparaissent à cet instant précis ?

Bernard : Un état succède à un autre état. Que cette transition se passe dans la joie ou non, cela ne présente aucun intérêt.