Je ne veux plus rien savoir, sinon le connaître Lui!

saint suaire

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« Nescivi » : « je n’ai plus rien su ». Voilà ce que chante l’épouse des cantiques après avoir été introduite dans le cellier intérieur…..
Je ne sais plus rien, je ne veux plus rien savoir, sinon le connaître Lui, la communion à ses souffrances, la conformité à sa mort……………………..
Il me semble que conserver sa force au Seigneur, c’est faire l’unité en tout son être par le silence intérieur, c’est ramasser toutes ses puissances pour les occuper au seul exercice de l’Amour, c’est avoir cet œil simple qui permet à la lumière de Dieu de nous irradier.

Une âme qui discute avec son moi, qui s’occupe de ses sensibilités, qui poursuit une pensée inutile, un désir quelconque, cette âme disperse ses forces, elle n’est pas tout ordonnée à Dieu : sa lyre ne vibre pas à l’unisson et le Maître, quand il la touche, ne peut en faire sortir des harmonies divines, il y a encore trop d’humain, c’est une dissonance.

L’âme qui se garde encore quelque chose en son royaume intérieur, dont toutes les puissances ne sont pas encloses en Dieu, ne peut être une parfaite louange de gloire;elle n’est pas en état de chanter sans interruption ce grand cantique dont parle Saint Paul, parce que l’Unité ne règne pas en elle ; et au lieu de poursuivre sa louange à travers toutes choses dans la simplicité, il faut qu’elle réunisse sans cesse les cordes de son instrument qui sont un peu perdues de tous côtés.

Combien elle est indispensable, cette belle Unité intérieure, à l’âme qui veut vivre ici bas de la vie des bienheureux, c’est à dire des êtres simples.
Il me semble que le Maître regardait là lorsqu’il parlait à Madeleine de « l’unique nécessaire ». Comme la grande sainte l’avait compris ! L’œil de son âme éclairée par la lumière de la foi, avait reconnu son Dieu sous le voile de l’humanité ; et dans le silence ; dans l’Unité de ses puissances…elle ne savait plus rien sinon Lui ! On pouvait faire du bruit, s’agiter autour d’elle : « Nescivi : elle ne savait plus rien ! »On pouvait l’accuser : « Nescivi » !.
Pas plus son honneur que les choses extérieures ne peuvent la faire sortir de son sacré silence.
Elle demeure si présente à Lui dans sa belle simplicité qu’il la garde avec un soin jaloux.
Alors peuvent survenir les agitations du dehors, les tempêtes du dedans:Nescivi !
Dieu peut se cacher, lui retirer sa grâce sensible : Nescivi !

Si je veux que ma cité intérieure ait quelque conformité et ressemblance avec celle du Roi des siècles immortel, et reçoive le grande illumination de Dieu, il faut que j’éteigne toute autre lumière et que l’agneau en soit le seul flambeau.

Voici la foi, la belle lumière de foi qui m’apparaît. C’est elle seule qui doit m’éclairer pour aller au devant de l’époux.

Le psalmiste chante qu’Il se cache dans les ténèbres puis semble d’autre part se contredire en disant que la lumière l’environne comme d’un vêtement. Ce qui ressort pour moi de cette contradiction apparente c’est que je dois me plonger dans la ténèbre sacrée en faisant la nuit et le vide dans toutes mes puissances : alors je rencontrerai mon Maître et la lumière qui l’environne comme d’un vêtement enveloppera aussi, car il veut que l’épouse soit lumineuse de sa lumière, de sa seule lumière ayant la clarté de Dieu..

La foi dit Saint Paul est la substance des choses que l’on doit espérer et la démonstration de celles que l’on ne voit pas.

Qu’importe à l’âme qui s’est recueillie sous la clarté que crée en elle cette parole, de sentir ou de ne pas sentir, d’être dans la nuit ou la lumière, de jouir ou de ne pas jouir.Elle éprouve une sorte de honte de faire de la différence entre ces choses ; et lorsqu’elle se sent encore touchée par elles, elle se méprise profondément pour son peu d’Amour, et regarde vite à son Maître pour se faire délivrer par Lui. Elle l’exalte sur la plus haute cime de la montagne de son cœur, au dessus des douceurs et des consolations qui découlent de Lui, car elle a résolu de tout dépasser pour s’unir à celui qu’elle aime…….

Alors elle peut servir Dieu nuit et jour en son temple ! Les épreuves du dehors et du dedans ne peuvent la faire sortir de la sainte forteresse où le Maître l’a renfermée.
Elle n’a plus ni faim, ni soif car malgré son désir consumant de la Béatitude, elle trouve son rassasiement en cette nourriture qui fut celle de son Maître : « La volonté du Père »
Elle ne sent plus le soleil tomber sur elle et ne souffre plus de souffrir.
Alors l’agneau peut la conduire aux sources de la Vie.
Être enraciné et fondé en l’Amour : telle est, me semble -t’-il, la condition pour remplir dignement son office de « louange de gloire ».

L’âme qui pénètre et qui demeure en ces profondeurs de Dieu, qui fait par conséquent tout en Lui, avec lui, par Lui et pour Lui, avec cette limpidité du regard qui lui donne une certaine ressemblance avec l’être simple-cette âme par chacun de ses mouvements, de ses aspirations, comme par chacun de ses actes, quelques ordinaires qu’ils soient, s’enracine plus profondément en celui qu’elle aime.

Et d’abord l’âme doit se prosterner, se plonger dans l’abîme de son néant, s’y enfoncer tellement qu’elle trouve la paix véritable, immuable, que rien ne trouble, car elle s’est précipitée si bas que personne n’ira la chercher là !
Alors elle pourra adorer. L’adoration : ah!C’est un mot du ciel!il me semble que l’on peut la définir comme l’extase de l’Amour.

C’est l’Amour écrasé par la beauté, la force, la grandeur immense de l’objet aimé et il tombe dans une sorte de défaillance, dans un silence plein, profond.
L’âme qui se recueille ainsi vit dans un Ciel anticipé, au dessus de ce qui se passe, au dessus des nuages, au dessus d’elle même.
Elle se quitte et passe en un Autre !